Contre Broadcom, le CISPE multiplie les éléments à charge
L'observatoire européen du CISPE publie un deuxième rapport sur Broadcom. Il y pointe l'absence d'avancées concrètes... et alourdit les charges.

Fournisseur de services ou revendeur ? Pour les CSP européens partenaires de VMware, telle est la question. Tout du moins d'après le CISPE, qui les représente.
L'association affirme qu'ils doivent effectivement choisir, depuis peu, entre l'un et l'autre statut, en conséquence d'une modification des structures d'incitation. Elle en fait part dans le cadre de son observatoire européen constitué l'an dernier.
Celui-ci supervise, en premier lieu, les engagements de Microsoft en matière de concurrence cloud. Il surveille néanmoins aussi les pratiques de Broadcom. Son premier rapport à ce sujet, publié en février, avait donné le ton : indicateurs au rouge, assortis d'un appel à une "enquête formelle" de la part du régulateur européen.
Ce rapport mentionnait diverses procédures en justice, engagées en particulier en France (Orange, Thales...) avec l'objectif de préserver des conditions de licence antérieures - en attendant la négociation de conditions "plus justes" - ou bien d'obtenir un délai pour migrer vers des solutions alternatives. Dans le cadre de ces litiges, nous expliquait-on, Broadcom a recouru à des techniques dilatoires qui lui ont permis de retarder les décisions sur le fond. Par ailleurs, dans la plupart des cas, les parties concernées n'auraient pas osé aller en justice par peur de représailles, d'autant plus que la pression ne se limiterait pas aux licences VMware (elle s'étendrait aussi, notamment, aux logiciels mainframe).
Un rapport pour actualiser, une annexe pour récapituler
L'observatoire vient de produire un deuxième rapport... pas plus reluisant pour Broadcom. Il se concentre sur les derniers mouvements "nuisibles" du groupe américain. Parmi lesquels, donc, les changements structurels au sein du programme partenaires, perçus comme une restriction de concurrence pour les CSP européens, souvent amenés à jouer à la fois le rôle de revendeur et de fournisseur de services.
Y est plus globalement dénoncé le "doute que Broadcom continue à semer" quant à ses conditions de licence. Ainsi que les "approches litigieuses" que constitueraient l'envoi de lettres de mise en demeure aux détenteurs de licences perpétuelles et la plainte contre Siemens aux USA.
L'essentiel des éléments à charge figurent dans une annexe qui constitue une forme de récapitulatif des faits. En première ligne, la mise au rancart de nombreux produits à la faveur de bundles, "sans fonctionnalités nouvelles ou améliorations". Et, parallèlement, la fin des licences perpétuelles comme du modèle pay-as-you-go, remplacés par "des abonnements de 3 ans avec prix de base prédéterminé". La facturation n'est plus basée sur l'usage réel, à contre-courant des fondements du modèle cloud, commente le CISPE.
Des solutions "essentielles" sans alternative fonctionnellement équivalente
L'association l'admet : depuis la publication du premier rapport, la majorité de ses membres ont signé de nouveaux accords de licence. Mais elle assure qu'on leur a largement forcé la main, en les privant d'un préavis suffisant.
Au final, les coûts "ont souvent décuplé". Broadcom propose bien des réductions de 30 à 50 %, mais à condition de s'engager pour 3 ans à prix fixe.
À date, un seul membre est parvenu à quitter complètement VMware. La nature de ses workloads lui a permis d'implémenter une solution open source après avoir investi "plusieurs mois de développement logiciel en impliquant [ses] 400 employés", nous assure-t-on.
Lire aussi : Broadcom lâcherait l'activité SD-WAN de VMware
Pour la plupart des cas d'usage, il n'existe actuellement pas d'alternative fonctionnellement équivalente, considère le CISPE. Quant à celles qui s'en approchent, elles induiraient la nécessité de déplacer les workloads chez les hyperscalers américains... et le risque de voir les prix augmenter encore plus.
La nature essentielle des solutions VMware est confirmée par le fait qu'elles sont les seules certifiées pour certains workloads, comme les bases de données SAP, précise l'annexe du rapport.
Modifications contractuelles : le CISPE exige 6 mois de préavis
Dans ce contexte, additionné d'une plainte auprès de l'UE par l'association VOICE (homologue allemande du Cigref), le CISPE incite Broadcom à prendre des mesures. Entre autres :
- Garantir au moins 6 mois de préavis pour toute modification des conditions contractuelles ou des structures tarifaires
- Négocier contractuellement les frais applicables lors des pics d'utilisation, tout en s'abstenant de pénaliser les CSP en cas de sur- ou sous-utilisation
- Adopter des options de licensing flexibles permettant des réductions sur engagement de volume
- Faciliter l'accès des plus petits CSP aux plus hauts niveaux de partenariat, y compris en les exemptant de certains seuils ; leur octroyer, en outre, des extensions d'onboarding d'au moins 6 mois lorsqu'ils entrent en marque blanche
- Permettre aux CSP d'être à la fois revendeurs et fournisseurs de services
- Maintenir la confidentialité des clients finaux et le reporting anonymisé de l'usage
Illustration © maurice norbert - Adobe Stock
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